Booster l’investissement en Afrique : entre incitations fiscales, accompagnement stratégique et défis structurels
Dans un contexte de transitions majeures – démographique, énergétique et climatique – l’Afrique se positionne plus que jamais comme une terre d’opportunités pour les investisseurs. Mais pour transformer ces opportunités en projets concrets, encore faut-il un cadre fiscal attractif, un accompagnement efficace, et des réponses pragmatiques aux réalités du terrain. Retour sur les enseignements clés de la réunion Boost Investissement Afrique tenue le 27 juin 2025, lors de la REF FRANCO 2025 à Brazzaville.
1. Une fiscalité en mutation : vers un environnement plus attractif
La simplification du système fiscal a été au cœur des échanges. L’un des exemples les plus significatifs : la suppression de 24 taxes pesant sur l’import-export, souvent jugées arbitraires et dissuasives par les entrepreneurs. À cela s’ajoute un changement de paradigme : les contrôles fiscaux et douaniers sont désormais réalisés sur la base d’une approche par les risques (décret d’octobre 2023), limitant les contrôles systématiques.
Les dispositifs d’exonérations fiscales présentés renforcent cette dynamique :
- Jusqu’à 5 ans d’exonération d’IS pour les projets éligibles à la Charte des investissements.
- Exonérations permanentes d’IS pour les entreprises du secteur agricole, élevage, pêche, pisciculture (loi de finances 2021).
- Possibilité de 10 ans d’exonération pour les implantations en Zones Économiques Spéciales (ZES).
2. Des secteurs prioritaires identifiés
La réunion a permis de cibler les secteurs jugés stratégiques par les autorités économiques :
- Agriculture : enjeu majeur de souveraineté alimentaire, dans un pays qui importe pour près de 700 milliards de denrées chaque année.
- Énergie : avec une forte dépendance aux énergies fossiles, les besoins en infrastructures renouvelables (solaire, hydraulique) sont immenses.
- Santé & Éducation : à forte dimension démographique et sociale, ces secteurs exigent des modèles économiques adaptés au pouvoir d’achat local.
- Finance inclusive : levier central pour bancariser les populations et renforcer le tissu entrepreneurial.
- Tourisme, immobilier, économie numérique complètent cette cartographie des opportunités.
3. Des investisseurs en quête de lisibilité
Les clubs d’investisseurs présents (notamment Investor for Africa) insistent : le financement est disponible, en particulier pour les projets à impact (énergie verte, agriculture durable). En 2024, près de 400 millions de dollars ont été investis sur le continent dans des projets verts.
Mais une condition majeure subsiste : présenter des dossiers structurés et économiquement viables, avec un modèle éprouvé ou en voie de l’être. Pour les projets en phase d’idéation, l’accès au capital reste limité, et le besoin de dispositifs de financement early-stage demeure critique.
4. Un accompagnement encore perfectible
Malgré la présence d’agences dédiées – Agence de création des grandes entreprises, Agence de développement des PME, FIGA… – l’accompagnement est perçu comme mal connu, peu lisible, voire inopérant sur le terrain. Les entrepreneurs appellent à :
- Un guichet unique pour centraliser les démarches.
- Une cartographie économique accessible, par secteur et territoire.
- Une meilleure coordination entre acteurs publics.
- La valorisation des produits locaux, souvent plus coûteux que les produits importés.
5. Recommandations pour faire décoller les investissements
Plusieurs pistes concrètes sont proposées :
- Créer des espaces de mise en relation directe entre investisseurs et entrepreneurs.
- Lancer des programmes de mentorat sur la structuration financière et le pitch investisseur.
- Renforcer les infrastructures de base : accès à l’énergie, logistique, packaging.
- Évaluer l’impact réel des politiques fiscales et d’accompagnement existantes pour mieux les adapter.
Conclusion
L’Afrique n’est pas seulement un terrain d’avenir, elle est un terrain d’action. Mais pour libérer tout son potentiel entrepreneurial et productif, il est essentiel de renforcer la lisibilité du cadre d’investissement, d’assurer un accompagnement à la hauteur, et de bâtir des passerelles solides entre les porteurs de projets et les financeurs.
Audrey Angoula – DAF Externalisée & Experte des environnements internationaux
Accompagner les structures dans leur stratégie d’implantation, de financement et de structuration en Afrique et en France.